Le samedi 21 octobre à 20h à La Centrale
Alvin Curran décrit ses performances solo intensément ludiques et poétiques comme suit :
Mes performances en solo sont les musiques avec lesquelles je suis né. (...) Aujourd'hui, cette forme est l'une de mes façons préférées de faire de la musique parce qu'elle exige toute la vérité et rien que la vérité ! TransDadaExpress, Endangered Species, et The Alvin Curran Fake Book sont les derniers titres que j'ai donnés à ces concerts, où je présente un mélange spontané de piano (Diskklavier si disponible), de clavier MIDI activant des échantillons, de processeurs, de voix, de cuivres et d'autres petits instruments. Il s'agit toujours d'exercices imprévisibles de 45 à 90 minutes, combinant rigueur et d'anarchie, où les extrêmes minimalistes et maximalistes se rencontrent ; où la musique est toujours un tour de montagnes russes, mais à l'intérieur d'un temple.
Documents en vitrines
En 2017, pensionnaire à la Villa Médicis, Maxime Guitton commence une recherche dans les archives d’Alvin Curran. Celles-ci lui dévoilent peu à peu des pans importants de l’histoire de la musique d’avant-garde, tant dans ses liens avec d’autres arts et avec l’histoire politique et sociale que dans la manière dont elle a pu se développer dans sa radicalité, entre pratiques communautaires et contemplation de la nature. Dans l’expérience qui a consisté à étendre le projet filmique d’Eric Baudelaire (When There Is No More Music to Write And Other Roman Stories) à un dispositif d’exposition, Alvin Curran et Maxime Guitton ont composé ensemble ces vitrines.
Yamaha Diskavier piano, enregistrement numérique
Era Ora est une expression italienne signifiant «Il est temps». ). C’est au départ le titre d’une œuvre pour piano de 1982 dont Alvin Curran proposera par la suite diverses variations, pour deux pianos, notamment, avec des partitions identiques jouées à des tempos très légèrement variables par les deux interprètes.
En suspendant un piano, Alvin Curran suggère un envol. La pièce a pu être montée pour la première fois à Bristol en 2022 lors de l’exposition commune d’Eric Baudelaire et Alvin Curran au centre d’art Spike Island.
Objets trouvés, moniteur, texte manuscrit
Alvin Curran l’explique dans ses entretiens avec l’historien de la musique Maxime Guitton, qu’Eric Baudelaire a repris dans When There Is No More Music to Write. Il ne croit pas à la fin de l’histoire, il ne croit pas qu’il n’y ait plus rien de possible après les musiques atonales, dodécaphoniques, dissonantes qui se sont développées après la catastrophe humaine de la Seconde Guerre mondiale. Pour lui, tout commence, il voit en germes une musique libérée, spontanée, créée en temps réel, non commercialisable. «On est au début de l’histoire».
Comme le dit le protocole pour la collecte d’instruments qui accompagne l’Instrumentarium, un instrument de musique peut-être fait de n’importe quel matériel qui puisse produire des vibrations audibles. Le texte se conclut ainsi : «Ma musique est faite de tous les sons, humains, animaux, mécaniques, géologiques, atmosphérique… Rappelez-vous seulement : il y a de la musique dans toute chose, chez toutes les personnes, dans tous les lieux, partout, en tout temps.»
Né en 1938 à Providence (US)
Vit à Rome
"Démocratique, irrévérencieux et traditionnellement expérimental, Curran voyage dans un chariot couvert informatisé entre le Golden Gate et le Tibre, et fait de la musique pour toutes les occasions avec n'importe quel phénomène sonore - un mélange volatile de lyrisme et de chaos, de structure et d'indétermination, de cornes de brume, de violons et de têtes de violons. Il se consacre à la restauration de la dignité de la profession de musicien non commercial dans le cadre d'une recherche personnelle de formes sociales, politiques et spirituelles futures".
Voilà qui décrit bien le compositeur, interprète, improvisateur, artiste sonore et écrivain américain Alvin Curran (né le 13 décembre 1938), dont le travail est présent tout au long de cette Biennale Son par le biais d’installations et de ses collaborations avec Eric Baudelaire et Maxime Guitton. Il est né à Providence, Rhode Island, et vit et travaille à Rome, en Italie. Il est le cofondateur, avec Frederic Rzewski et Richard Teitelbaum, de Musica Elettronica Viva, et un ancien élève d'Elliott Carter. La musique de Curran fait souvent appel à l'électronique et à des sons trouvés dans l'environnement. Il a été professeur de musique au Mills College en Californie jusqu'en 2006 et enseigne aujourd'hui en privé à Rome et sporadiquement dans diverses institutions.
La musique de Curran embrasse toutes les contradictions de la création musicale (composée/improvisée, tonale/atonale, maximale/minimale...) dans une rencontre dialectique sereine. Ses plus de 200 œuvres font appel à des sons naturels enregistrés/échantillonnés, au piano, aux synthétiseurs, aux ordinateurs, au violon, aux percussions, au shofar, aux cors de bateaux, à l'accordéon et aux chœurs. Qu'il s'agisse de la forme intime de ses célèbres performances en solo, de musique de chambre pure, d'œuvres radiophoniques expérimentales ou d'environnements sonores et d'installations à grande échelle spécifiques à un site, toutes ces œuvres forgent un langage très personnel à partir de tous les langages, grâce à une recherche approfondie et à une invention recombinante.
Né en 1977 à Dunkerque
Vit à Marseille
Maxime Guitton a été l’assistant de la compositrice Eliane Radigue entre 2009 et 2011. Ses champs de recherche - la musique minimaliste et l'histoire de l'alpinisme - l'amènent à intervenir en écoles et centres d'art pour des cours, ateliers, conférences et sessions d'écoute. Depuis 2017, il mène une recherche sur les archives du compositeur Alvin Curran commencée lors d’un séjour comme pensionnaire la Villa Médicis.
Il a été responsable du service du soutien à la création au Centre national des arts plastiques (CNAP) à Paris. Il exerce parallèlement depuis 2003 des activités de programmation musicale entre lieux indépendants et institutions (BAL, CAPC, Centre Pompidou, etc.). Il est actuellement coordinateur de la recherche et programmateur artistique et culturel aux Beaux-Arts de Marseille.